Homélie du 3éme dimanche de Pâques « Leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent ! »

Homélie/3ème Dimanche de Pâques 26-04-20

Textes : Actes des Apôtres 2, 14.22b-33 ; Psaume 15 (16), 1-2a.5.7.8. 9. 10. 11 ; 1ère Lettre de Saint Pierre 1, 17-21 ; Évangile selon Saint Luc 24, 13-35

« Leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent ! »

Frères et Sœurs Bien-Aimés de Dieu,

Placé dans l’orbite de la fête de pâques, cet évangile d’aujourd’hui apparaît comme l’un des récits majeurs des apparitions du Christ ressuscité. En effet, il se manifeste à deux de ses apôtres et engage un dialogue de cœur à cœur avec eux : « De quoi discutez-vous en marchant ? », leur lance-t-il.

Rappelons-nous bien qu’après la mort tragique de Jésus sur la croix, ses Apôtres étaient désemparés. C’était le chaos dans leur camp. Pour eux, tout était fini ; Jésus n’a pas pu se défendre. Ils ne peuvent donc plus compter sur lui. Jésus…c’est terminé ! Ils s’attendent maintenant à subir le même sort que Jésus : mourir sur une croix. Ils cherchent donc à se faire oublier.

En raison du danger qui les menace, ils évitent d’aller se promener en ville. Pleins de désespoir, ils se rétractent dans une maison, bien verrouillée. C’est le début d’un certain confinement…

Cependant, deux disciples, dont Cléophas, s’échappent de Jérusalem. Ils avaient été témoins eux aussi de la Passion et de la mort ignoble de leur maître. Pour eux, c’était bien la fin d’une grande espérance, d’où le retour chez eux, à la maison, à Emmaüs ! Jésus on n’en parle plus ! « Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël ».

Ce récit fait penser à tant d’hommes et de femmes qui traînent le poids du jour, qui marchent sur les chemins de cette vie sans enthousiasme, frustrés par de nombreuses déceptions.
Ce récit fait penser à tant de chrétiens qui sont bouleversés dans leur foi.
Ce récit fait penser, enfin, à tous ceux qui, à cause des incompréhensions, des injustices, de la méchanceté et de l’hypocrisie rencontrées, parfois même dans l’église, dans nos Saintes Églises, ont envie de tout abandonner, de jeter l’éponge ou de se sauver pour retourner à leur Emmaüs.

C’est dans ce contexte de désespoir teinté de calcul trop humain que le Christ ressuscité apparaît à ces deux disciples d’Emmaüs qui ne le reconnurent point, parce que leurs yeux étaient complètement aveuglés par la tristesse et la déception !
Aujourd’hui encore, ce même Christ nous rejoint sur nos routes, dans nos services, dans notre confinement. Quand tout va mal, quand nous sommes seuls, tout seul parfois, à nous battre pour tenir le coup, il est là. Il est là pour lancer le débat, pour initier un dialogue de cœur à cœur avec nous, comme le rappelle bien cette prière eucharistique : « Nous te glorifions, Père très saint : tu es toujours avec nous sur la route, et plus spécialement encore lorsque ton fils Jésus nous rassemble pour le repas de l’amour. Comme jadis pour les disciples d’Emmaüs, il explique pour nous l’Écriture et nous partage le pain. » Mais trop souvent, nous ne le reconnaissons pas, car nous sommes souvent ailleurs…Tous disciples d’Emmaüs !

Mais le Christ Ressuscité reste vigilant ! Il nous suit pas à pas patiemment, quelle que soit la situation dans laquelle on se trouve. Il veille au grain ! C’est pourquoi, il s’invite chez les disciples en fuite vers Emmaüs. Il fait irruption dans leur vie ravagée par la détresse, car lui ne peut abandonner les siens ! C’est vraiment une Bonne Nouvelle pour chacun de nous que la présence du Christ puisse nous rejoindre jusque dans nos emprisonnements, nos découragements ; quand l’espérance fait défaut et que nous n’avons que regret et tristesse dans le cœur à l’instar de ces disciples d’Emmaüs.

Cette Bonne Nouvelle prend réellement forme quand les yeux de ces deux disciples s’ouvrirent enfin et le reconnurent dans la fraction du Pain. Et pour Saint Augustin « si Jésus n’a voulu être connu qu’à cet instant de la fraction du pain, c’est pour que les générations futures puissent le reconnaître désormais sous ces espèces du pain eucharistique » . Pour Saint Augustin, l’ouverture des yeux, c’est l’expression du mystère de la foi ! Dans ce monde, nous ne voyons jamais le Christ autrement que par les yeux de la foi.

Bien-Aimés de Dieu, on ne le voit bien qu’avec ce regard de la foi ! « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? ». Alors leurs yeux s’ouvrirent et les disciples firent l’expérience de la Présence du Christ ressuscité vivant au milieu d’eux.

Que le Seigneur ouvre nos yeux pour que nous puissions le reconnaitre vivant au milieu de nous, dans l’Eucharistie et dans sa Parole ; qu’il ouvre les yeux de notre foi pour que nous puissions le reconnaitre dans les autres, nous ouvrir à son dialogue de cœur à cœur avec lui, afin que, par lui, nous ayons toujours la joie de Pâques, la paix véritable pour nos familles et le monde dès maintenant et pour les siècles des siècles, amen.

Père Omer