Message de Mgr Le Stang pour Pâques

La joie de Pâque :
Traverser la mort, protéger la vie.

De plus en plus, dans une société aux pathologies multiples, malgré tant de potentiel, nous mesurons l’originalité de l’Espérance chrétienne. La mort n’est pas pour le disciple du Ressuscité un spectre effrayant, ni un mur qui se dresse en face de nous, mais un passage avec Jésus et par Lui, vers la joie du ciel, déjà dans notre cœur. Accueillir d’être mortel, consentir à perdre peu à peu sans amertume ni nostalgie, accepter de dépendre et d’être fragile, s’abandonner entre les bras de ceux qui nous entourent et se laisser attirer vers Dieu. Tout cela n’est pas du néoromantisme, ni une incitation à la résignation. C’est le combat de la vie : il nous conduit à nous laisser désarmer, en traversant parfois des vallées de larmes, pour ne tenir que dans la véhémence de l’amour, dans la paix du cœur et le bonheur d’être un vivant.

Il est original d’être disciple du Ressuscité ! Et cela se voit de plus en plus dans les anxiétés du temps et leurs résolutions problématiques. Cela ne nous met pas en surplomb du monde, mais un peu en décalage tout de même. Ce décalage de l’Évangile, – payé par Jésus au prix fort -, est parfois difficile à vivre quand il se transforme en soupçon ou rejet. Mais il est bénéfique. Celui qui passe de la mort à la vie avec Jésus, porte regard autre sur sa propre vie, et sur toute réalité. Il est critique à l’égard de ceux qui cherchent à faire prendre des vessies pour des lanternes. Il ne se satisfait pas de solutions qui abîment la dignité de l’homme, la justice et le respect qui lui sont dû. Il sait voir l’éternité de Dieu au cœur du temps, et cela le libère de la peur de la fin de vie et de la mort, qui vrille l’estomac de tant de gens. Celui qui vit en ce monde en disciple du Ressuscité, passe par la croix certes mais aussi par le relèvement et le pardon. Celui qui voit la présence de Dieu dans les autres et dans la Création, refuse la fuite en avant, le repli sur soi, l’idolâtrie des images mensongères et de la jouissance à tout prix, celui-là vit déjà dans la vie libérée de la mort. Il choisit d’habiter le réel de la vie, pas toujours folichon certes, mais un réel créé, rejoint et sauvé par Dieu. Qu’il est bon d’habiter un monde où le Dieu de la Vie a établi sa demeure à jamais !

Alors que les nouveaux barbares de notre temps, – comme dans les temps les plus archaïques -, optent pour la guerre et tant de sacrifices humains ; alors que la vie humaine est si souvent maltraitée et monnayée, comme Jésus vendu par Judas pour quelques pièces, le printemps pascal rend le disciple-missionnaire résistant, tenace, courageux sur la route qui conduit de la Croix à l’Éternité bienheureuse. Le triomphe de la Vie est déjà assuré. Ne perdons ni notre temps, ni notre espérance ! Il vit le Christ et il nous veut vivant ! Alléluia !

Belle joie pascale à tous
Et en particulier à ceux qui nous ont rejoint la nuit pascale, par le sacrement du baptême.

+ Mgr Gérard Le Stang.
Évêque d’Amiens.