Saint François de Sales aujourd’hui

le message de saint François de Sales est il toujours d’actualité ?

Une réponse nous est donnée par le Pape François, dans sa lettre apostolique « Totum amoris est » ou « Tout est à l’amour » parue le 28 décembre 2022. Parlant d’héritage spirituel laissé par saint François de Sales, le Pape confirme que ses écrits l’ « Introduction à la Vie Dévote » (publiée en 1609), le « Traité de l’Amour de Dieu » (publié en 1616) et toutes ses lettres d’amitié spirituelle ne sont pas une simple théorie loin des préoccupations de l’homme ordinaire, mais un réel enseignement né de son expérience pastorale. 

Saint François de Sales le dit lui-même : « Je propose simplement […] ce que le  ministère des âmes (on dirait aujourd’hui l’accompagnement spirituel) et vingt-quatre années de prédications m’ont fait juger comme devant contribuer au mieux à la gloire de l’Evangile et de l’Eglise ».  

A 400 ans d’intervalle, nos sociétés sont bien différentes, mais le quotidien des personnes est tout aussi troublé, incertain, angoissant, avec des guerres de territoire ou de religions, des épidémies, des manques d’éducation, d’extrêmes pauvretés, des richesses non partagées, une nature qui crie… 

La question de la religion se pose différemment : en son siècle, on est catholique ou protestant ; saint François de Sales est âgé de  cinq ans lors du massacre de la St Barthélémy. Aujourd’hui la foi en Dieu et l’Eglise ne sont plus forcément une priorité dans la vie de chacun. 

Comment saint François de Sales peut-il s’y prendre pour nous parler aujourd’hui ? 

Avec simplicité et bonté, toujours ! Il use en abondance de quelques « outils » essentiels et intemporels : un amour fou pour le Christ et pour l’Eglise, une parfaite connaissance des Saintes Ecritures, l’émerveillement devant la Nature qui l’instruit, l’Esprit Saint qui illumine toute sa pensée et lui permet de s’adapter à chacun,  une charité sans limite car « il est à tous », et enfin une « confiance totale en la Providence de Dieu pour le soin du reste », dit-il lui-même.  

Voici quelques points forts de sa spiritualité, pour une « Eglise qui fait du bien » comme le dit Mgr Le Stang… Rien de neuf en théologie : « Avec les mêmes fleurs, on peut composer des bouquets divers… Dans cette « Introduction », je ne peux, ni ne veux, ni ne dois rien écrire qui n’ait déjà été dit par nos prédécesseurs. Ce sont bien les mêmes fleurs que je te présente ici, mon cher lecteur, mais je te les présente et les dispose à ma manière, qui sera différente. » 

De bonnes nouvelles : « Dieu est le Dieu du cœur humain ; il est pour tous » et « L’homme a grand besoin du bien et grande capacité à le recevoir. Dieu en dispose en grande abondance et a une grande inclination à le donner. » Ca tombe plutôt bien ! 

De bons conseils et tout d’abord la chaleur de l’accueil : «  Mon cher lecteur, ma chère Philothée, mon bon Théotime… ». Avec saint François de Sales, pas d’anonymes mais, avec chacun, toujours une relation personnelle et chaleureuse, comme avec des frères et sœurs en Christ, du plus humble au plus couronné, parmi les malades, les religieux, les détenus, les soldats, les ennemis aussi. 

Cette façon de considérer l’autre devrait bien être la nôtre aujourd’hui…  

Un enseignement qui édifie notre vie spirituelle, toujours établi sur les Ecritures, la louange et débordant de bonté. La Parole de Dieu, déployée et expliquée, prend place tout naturellement dans notre vie quotidienne et la transforme. Ses conseils structurent notre prière, nos méditations. 

• Nous sommes impatients : « Rappelez-vous souvent que Notre-Seigneur nous a sauvés en souffrant et en endurant… »  
• Nous nous jugeons imparfaits : « Ne nous étonnons pas de nos imperfections. Notre perfectionnement consiste précisément à les combattre. Et saurions-nous les combattre sans les connaître, et les vaincre sans les combattre ? » ; « Il n’y rien d’anormal à ce que l’incapacité soit incapable, la faiblesse faible et la misère misérable. » 
• Nous regrettons notre faute : « Corrigeons notre cœur en le raisonnant avec compassion : Allons, mon pauvre cœur, relevons-nous ! Appelons-en à la miséricorde de Dieu ; reprenons le chemin de l’humilité… ». 
• Parlons avec notre cœur : « Qui a Jésus en son cœur ne tardera pas à l’avoir en toutes ses actions » ; « Qui gagne le cœur de l’homme, gagne bientôt tout l’homme ». De quoi séduire un Don Bosco à venir 200 ans plus tard. 
• Cultivons la fidélité en Dieu : « Les occasions d’accomplir de grandes choses pour Dieu sont rares. Mais les occasions d’en accomplir de modestes ne manqueront jamais. Faites donc toutes choses au nom de Dieu, et tout sera bien fait ». 
• Confions-nous à un accompagnateur spirituel ou une accompagnatrice. Pour saint François de Sales, c’est là le conseil des conseils. « Ma chère fille, vous exprimez le désir d’être accompagnée, Dieu soit loué ! » « Demandez à Dieu de vous donner un guide selon son cœur, et ne doutez pas d’être exaucée ; marchez avec lui avec simplicité, humilité et confiance : vous ferez un très heureux voyage. » 

Sans oublier de penser aux autres ! Saint François de Sales nous donne aussi des conseils pour vivre une charité en actes : «  Je vous conseille de prendre la peine de visiter les hôpitaux, de consoler les malades, de considérer leurs infirmités, d’en attendrir votre cœur et de prier pour eux en leur faisant quelque assistance » ; « En tout, il faut que la charité domine et nous éclaire ».  

A Jeanne Frémiot, baronne de Chantal, qui deviendra avec lui co-fondatrice de l’Ordre de la Visitation Sainte Marie, après lui avoir conseillé de payer ses dettes, de simplifier ses besoins et de prendre soin  de ses domestiques : «  Il faut tout faire par amour et rien par force, il faut plus aimer l’obéissance que craindre la désobéissance ». 

Aux malades : « Ne vous fâchez pas de demeurer au lit… Il est mieux d’être sur la Croix avec Notre-Seigneur, que de la regarder seulement ». 

Concrètement aujourd’hui… 

Depuis 2017, temps béni où Sœur Jeannine Harvengt animait les rencontres avec sa pédagogie toute salésienne, un groupe d’environ 10 personnes s’est mis en route à la découverte de saint François de Sales. 

D’abord avec ses lettres d’accompagnement spirituel : elles répondent à des questions précises sur la prière, la confession, les difficultés familiales ; nous sommes directement concernés car ces questions sont encore les nôtres aujourd’hui. Au fil des lignes, le saint évêque s’y révèle dans la simplicité, sa bonté, sa douceur, son exigence aussi…  

Puis avec des extraits de « L’Introduction à la Vie Dévote » et ses méditations dirigées : les exemples puisés dans l’Ecriture et dans la Nature nous éclairent ; c’est lumineux, facile, engageant, ressourçant… 

Enfin depuis trois ans, des extraits du « Traité de l’Amour de Dieu » : Fini le parfum des fleurettes et le chant des petits oiseaux… Grattage de tête… Viens Esprit Saint ! 

On se questionne, on échange les idées et les ressentis, on pèse les mots, on fait des liens avec nos prières eucharistiques, avec nos vies de famille… On s’édifie les uns les autres.  

Le groupe, aujourd’hui constitué de vingt personnes et accompagné par le Père Patrick Derville, avance pas à pas, avec l’attention de chercheurs d’or. 

Eloge de l’écoute, du partage. Dieu est là et nous le savons ! Quelle chance de vivre cela ! 

Une ultime bénédiction…  

Extraite d’une lettre à une religieuse : « Que Dieu vous regarde avec amour, vous n’avez nul raison d’en douter. […] Examiner si votre cœur lui plaît, vous ne devez pas le faire mais bien plutôt examiner si son cœur vous plaît. […] Vivez joyeuse, Notre-Seigneur vous regarde, et vous regarde avec amour, et avec d’autant plus de tendresse que vous avez de faiblesse ». 

Alors, la spiritualité de saint François de Sales peut-elle s’inscrire dans la société d’aujourd’hui ? 

Elle le devrait. 

Martine Durand
Animatrice des samedis salésiens