Edito de Mgr Le Stang: « La messe la plus longue de l’année ».

La messe la plus longue de l’année.

Chez les chrétiens évangéliques ou orthodoxes, les offices durent « des plombes » et personnes ne s’en plaint. Chez les catholiques, dès que la messe dominicale dépasse les 55 minutes, on trouve cela interminable. Au moins on est là ! me direz-vous, quand bien des catholiques arrivent avec peine à leurs 55 minutes… annuelles.

Mais pour la vigile pascale, on se rattrape. Feu et cierges, cloches et alléluia, eau et huile, baptêmes et eucharistie, Parole et silence, nuit et lumière. Tout y passe. Ça dure…et on ne s’ennuie pas ! Il se trouve encore des baptisés qui (sans raison valable) sèchent la vigile pascale. Ils ne savent pas ce qu’ils ratent. Même (surtout) les enfants y ont leur place, écarquillant leurs yeux devant le feu joyeux, chantant à tue-tête les alléluia, avant de s’endormir dans les bras de leurs parents pendant le silence de la postcommunion. Si vous voulez faire l’expérience liturgique et communautaire de la Résurrection de Jésus, surtout, ne ratez pas la veillée pascale !

Notre foi est incarnée. Elle passe par des paroles et des signes. Elle se vit avec le corps et les sens. A la cathédrale, le facétieux recteur vient de faire la folie d’acheter (pas cher) un énorme encensoir, que j’ai peine à secouer. Mais ça fume et ça sent bon ! Notre prière monte vers le ciel comme un encens : Pas besoin de théories pour le comprendre (même si la prière se mêle aux toussotements des allergiques au cadeau fumant des mages adorant Jésus) !

Notre foi est incarnée. Cela est le cas dans la liturgie. Cela est le cas aussi de la vie. Les pieds bien plantés dans la terre de ce monde, nous essayons de donner corps à notre amour de Dieu dans nos mots et nos silences, notre pudeur et notre délicatesse, nos empathies et nos soutiens, nos attestations et nos protestations. La foi, ça passe par le cerveau, par le cœur, par les mains et par les pieds… par le vote aussi (faut-il le rappeler ?) et le respect.

Notre foi est incarnée. Pourquoi ? Parce que notre Dieu est incarné. Parce qu’il respecte la dignité de chaque personne humaine. Il n’est pas dans le ciel des enfumages idéologiques, des réclusions numériques, des aveuglements démagogiques. Tu veux rencontrer le Dieu vivant ? Apprends d’abord à être toi-même un vivant. Ouvre ton cœur, remercie le ciel, et donne-toi ! Et puis, regarde-le, l’homme des Béatitudes, mettre le prix, le prix de sa vie, son corps – un vrai corps humain souffrant -, son sang, pour réconcilier les hommes entre eux. Mesure ce don sans mesure du Jeudi Saint ! Et puis, au Vendredi Saint, contemple-le, interloqué, mourir pour toi au Golgotha, sans faire semblant. Pour toi. Enfin, une fois traversé le silence de Dieu au Samedi Saint, descend au tombeau : Constate qu’il n’y est plus ! Son corps spirituel de Ressuscité a mené l’humanité à son accomplissement éternel. Tu peux tenir bon dans ton combat pour l’Espérance. La mort est déjà morte. C’est Pâques !

Ah, mes amis, quel bonheur incroyable d’être chrétien ! Quelle Joie sans nom d’être, tout simplement, parmi tant d’autres, ami de Jésus. Il ouvre chacun de nos instants sur un horizon d’éternité. Fuyez les prophètes de malheur et ceux qui cèdent aux violences destructrices. Que la joie du Vivant prenne corps en vous et en ce monde ! Belles fêtes pascales à tous.

+ Gérard le Stang
Évêque d’Amiens