Le prix de la fraternité

Le prix de la fraternité

Nous venons de fêter le centenaire de la « grande guerre » et de l’armistice de 1918. Parmi tous les enseignements de ces événements, j’en retiens un pour aujourd’hui : la fraternité a un coût.

Non pas d’abord financier ou économique, mais elle demande des efforts. Elle demande de se déplacer, de changer de logique.

La paix issue de 1918 a malheureusement été un échec. Pour les français, la guerre de 1914 s’annonçait comme la revanche de celle de 1870. Elle a été un désastre. Après 4 années de guerre qui ont laissé le pays exsangue, la revanche n’a pas su s’exprimer autrement que par l’humiliation du vaincu. Suivront la crise économique de la fin des années vingt, et la montée des nationalismes « revanchards » qui mèneront à la deuxième guerre mondiale.

Hier comme aujourd’hui, rien ne se construit jamais par l’humiliation. Ressentiment contre ressentiment, revanche contre revanche, humiliation contre humiliation, et finalement violence contre violence, cela ne peut mener qu’à toujours plus de violence.

La paix et la fraternité exigent la justice et la vérité. Mais elles ne peuvent être figées dans la logique de la dette et de la revanche. Elles doivent voir plus loin, changer de plan. Elles ne peuvent pas se réclamer du manteau de la justice pour s’enfermer dans un quant-à-soi dominateur et méprisant. Elles ne sont pas naïves, elles savent être fermes et déterminées. Pourtant elles ne peuvent en rester là. C’est bien ainsi que les « pères de l’Europe », au lendemain de la seconde guerre mondiale, ont permis et mis en œuvre une paix durable.

Ainsi, La fraternité a un coût. Le coût d’un travail de vérité qui engage toutes les parties, le coût d’une conversion résolue et de décisions qui engagent, le coût du pardon qui dans sa gratuité assume la justice et la vérité mais oblige à sortir de la stricte logique de la dette et du calcul. Le coût aussi du tâtonnement, de la recherche toujours ouverte, de l’équilibre toujours à trouver.

C’est vrai entre les nations, c’est vrai dans la vie sociale d’un pays, c’est vrai dans la vie ecclésiale, c’est vrai dans les relations familiales et interpersonnelles.

Pour Dieu, c’est le coût de la croix, de sa vie donnée en Jésus-Christ. De l’homme à Dieu, la dette est incommensurable. Dieu, qui est justice et vérité, n’est pas dans la logique de la dette, qui finalement n’est qu’une logique comptable et marchande. Il se fait notre frère jusque dans la mort, pour que nous devenions des frères et sœurs dans la résurrection. La fraternité est un défi. Mais plus encore elle est une promesse en acte, par Jésus dans la grâce de l’Esprit.  « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent », déclare le psaume 84.

La fraternité est une grâce qui nous est sans cesse proposée. Et qui ne demande qu’a faire son œuvre en nous, et par nous.

Nous sommes les disciples-missionnaires de Jésus. Avec lui, nous voulons vivre la fraternité. Et en assumer le prix.

La fraternité a un coût.

Non pas d’abord financier ou économique, mais elle demande des efforts. Elle demande de se déplacer, de changer de logique.