« Nous qui sommes plusieurs, nous sommes un seul corps dans le Christ, et membres les uns des autres, chacun pour sa part. » Rm 12,5

« Nous qui sommes plusieurs, nous sommes un seul corps dans le Christ, et membres les uns des autres, chacun pour sa part » (Rm 12,5).

Très chers frères et sœurs, je vous propose ici quelques réflexions que m’ont suggéré l’étude et la méditation de Rm 12,5. Elles auraient mérité infiniment plus de temps de maturation que je leur ai consacré. Aussi, je vous les soumets à votre bienveillance, espérant qu’elles pourront porter quelques fruits.

1. Rm 12,5 est à comprendre avec le verset qui le précède, les deux formant une même phrase : « Prenons une comparaison : en un corps unique, nous avons plusieurs membres, qui n’ont pas tous la même fonction (v.4) ; de même, nous qui sommes plusieurs, nous sommes un seul corps dans le Christ, et membres les uns des autres, chacun pour sa part » (v.5).

2. Cette comparaison ne nous est pas étrangère, bien entendu. Nous la retrouvons en 1 Co 12. Les ressemblances sont troublantes. D’ailleurs, troublants sont les points communs entre les chapitres 12 et 13 de la première lettre aux Corinthiens et les mêmes chapitres dans la lettre aux Romains : même comparaison pour exprimer la diversité des membres et l’unité du corps, diversité des dons, appel à l’amour mutuel et fraternel …

3. Les ressemblances sont particulièrement troublantes concernant le verset qui nous intéresse. Notez plutôt :
– « Nous qui sommes plusieurs, nous sommes un seul corps dans le Christ, et membres les uns pour les autres, chacun pour sa part » (Rm 12,5).
– « Prenons une comparaison : le corps ne fait qu’un, il a pourtant plusieurs membres ; et tous les membres, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps. Il en est ainsi pour le Christ » (1Co 12,12).
– « Or, vous êtes corps du Christ et, chacun pour votre part, vous êtes membres de ce corps » (1Co 12,27).

4. Pour autant, il y a une différence – notable, me semble-t-il – que l’on ne retrouve pas en 1 Co 12. Il s’agit du syntagme « membres les uns pour les autres ». « Nous sommes un seul corps dans le Christ, et membres les uns pour les autres ». L’expression est extrêmement forte. Si je reprends la comparaison corporelle, c’est un peu comme si je disais que je suis le pied de Michel, sa main est la mienne, le nez de Juliette est le nôtre. Saint Paul insistait déjà, dans sa lettre aux Corinthiens, sur l’unité que nous avions à vivre en Christ ; il me semble qu’il pousse ici encore plus loin ce souci de l’unité et cette prise de conscience qu’il nous faut avoir.

5. La communauté fraternelle que nous sommes appelés à vivre doit passer par cette prise de conscience, par cette unité profonde que nous avons à vivre en Église, en Paroisse, en Diocèse, en Christ. Une unité fonctionnelle : tous, nous recevons de l’Esprit des dons, des charismes à mettre au service du corps entier, « du bien de tous » (1Co 12,7). Une unité fraternelle, quasi organique : « Si un seul membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance ; si un membre est à l’honneur, tous partagent sa joie » (1Co 12,26). D’où l’exhortation de Rm 12,15 : « Soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent ».

6. Saint Paul parle abondamment de l’Esprit Saint en 1Co 12. Le nom n’est pas mentionné en Rm 12 (seule « la grâce » est indiquée). Probablement une invitation à lire la Bible de manière canonique pour approfondir ce que le Seigneur a à nous dire. Ainsi, la mise en rapport des deux lettres pauliniennes ne nous invite-elle pas à prier le Seigneur Esprit Saint afin qu’il nous aide à faire toujours plus Église, à faire toujours plus corps en Jésus, à toujours plus d’amour fraternel ? Demandons-en-lui la grâce. Demandons-lui également qu’il nous donne de nous recevoir comme des dons les uns pour les autres. Demandons-lui aussi – lui « qui accorde à chacun des dons personnels divers comme il veut » (1Co 12,11) – qu’il nous aide à discerner les dons qu’il nous donne afin que nous les investissions, les vivions pleinement, pour le bien du corps entier, pour la gloire de Dieu et le salut du monde. Enfin, de manière plus particulière – et le chantier 5 va dans ce sens – demandons à l’Esprit Saint qu’il nous aide à découvrir le don que le Seigneur fait à son Église et au monde par les prêtres qu’il appelle à son service.

P. Jean-François JECKER

La communauté fraternelle que nous sommes appelés à vivre doit passer par cette prise de conscience, par cette unité profonde que nous avons à vivre en Eglise, en Paroisse, en Diocèse, en Christ.