L’orgue, partenaire de nos liturgies

Aux claviers des orgues de Saint-Martin depuis 50 ans (dont il est le titulaire), Pierre Reynaud a fêté son jubilé en septembre dernier.

A cette occasion, il rappelle la place et le rôle de l’instrument lors des offices où se tient notre communauté.

« Dès le départ, révèle Pierre Reynaud, j’ai proposé que plusieurs autres organistes puissent également jouer en cette église. Pour le milieu organistique amiénois d’alors, c’était enfreindre les traditions établies (un organiste par instrument) ». Pourtant ce « partage » remonte à Louis XIV, comme c’était déjà le cas à Versailles. Certes, le titulaire est responsable devant le propriétaire (Ville d’Amiens) et devant la paroisse. Mais son usage cultuel invite à exploiter ses qualités harmoniques et sa magnificence. Car il contribue à la prière liturgique et aux célébrations. Et il accompagne aussi l’assemblée dans ses chants. Ainsi participe-t-il pleinement au « Ministère de la Prière », comme le rappellent les textes de la Conférence des Évêques.

Or aujourd’hui, la formation institutionnelle des jeunes organistes ne prend plus en compte cette vocation cultuelle. Plus intéressés par son usage « laïque », ces derniers jouent davantage des pages orchestrales transcrites pour l’orgue, alors que son immense répertoire est constitué à 90 % d’œuvres sacrées, évidemment conçues par les compositeurs pour être jouées lors du déroulement des offices. Musiques contre liturgies ? En fait, pour « coller » à celles-ci, il faut un minimum de connaissances et de pratiques que la nouvelle génération n’a pas toujours : la liturgie de Pâques n’est pas celle de Noël ; le jeu de l’orgue des messes dominicales n’est pas celui de la célébration d’obsèques etc. « Lors de deuils, confie d’ailleurs Pierre Reynaud, l’organiste ressent souvent puissamment l’émotion et le recueillement de l’assemblée. Associé à la prière qu’il perçoit, il joue des pièces ou improvise en conséquence. » L’organiste n’est donc pas qu’un artiste, mais autant un homme de foi. Si « la pratique de l’orgue tend à se laïciser », nous dit encore Pierre Reynaud, il y a des exceptions : certains centres de formation organistique continuent de privilégier l’approche liturgique, comme par exemple dans le Diocèse d’Arras (sous l’impulsion initiale de l’abbé Pierre Podevin) ou dans certaines écoles de musique en Alsace, Bretagne, ….

Bernard FERY

AVEC LES ORGUES, NOS VOIX

Personnage souvent ignoré car perché en tribune, l’organiste n’est donc pas seulement le témoin des offices qui se déroulent dans la nef en contre-bas. Il est surtout l’acteur invisible et complice des liturgies que vivent les assemblées. Pour l’église Saint-Martin, si des organistes ont parfois décliné le service de cet instrument par manque d’intérêt liturgique, nous bénéficions actuellement des talents de cinq organistes qui assurent, à tour de rôle, les différents offices. Lorsque nous y participons, aux moments où ces musiques appellent nos voix, sachons lever la tête et penser à ceux qui aident à prier et à chanter grâce à la magie des timbres et des jeux de cet orgue remarquable.

Musiques contre liturgies ? En fait, pour « coller » à celles-ci, il faut un minimum de connaissances et de pratiques  : la liturgie de Pâques n’est pas celle de Noël ; le jeu de l’orgue des messes dominicales n’est pas celui de la célébration d’obsèques etc. ; L’organiste n’est donc pas qu’un artiste, mais autant un homme de foi.