« Récit de ma vocation de prêtre » par Mgr Le Stang

Aujourd’hui, 60e dimanche de prière pour les vocations, la France prie ! « Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson » (Mt 9,38). En ce dimanche du Bon Pasteur, Mgr Le Stang, nous livre le récit de sa vocation de prêtre.

Témoignage de Mgr Gérard Le Stang
Evêque d’Amiens

Ma vocation de prêtre 

« Mon secret est à moi ». Sollicité pour parler de ma vocation, il me revient ce mot de Sainte Édith Stein à qui une amie demandait de raconter sa rencontre avec le Christ, qui aboutit à son baptême et à son entrée au Carmel. « Mon secret est à moi », et au fond, à Dieu : on peut raconter des faits de notre histoire, mais comment traduire cet indicible qui nous a fait passer du Pourquoi moi au Pourquoi pas moi ? Ce mystère me dépasse. C’est sans doute bien ainsi, car la vocation d’un prêtre est d’abord « l’affaire de Dieu ».

Tout pourrait pourtant être raconté de façon simple. Cela arrivait ainsi dans le « monde d’avant » en Bretagne catholique : une famille chrétienne unie et nombreuse, une petite paroisse tenue par un bon prêtre (c’est-à-dire un prêtre bon), déjà âgé mais très apostolique. Un écho intérieur à une homélie évoquant un jeune voulant devenir prêtre missionnaire ; une vie eucharistique régulière, sans abandon à l’adolescence, et l’expérience intime, de plus en plus ardente, de la prière personnelle ; et aussi une scolarité en école catholique, quelques camps de jeunes, et au carrefour des choix de vie, la décision d’abandonner la faculté de médecine pour « soigner les âmes », comme on me l’a souvent redit.

Mais cela ne dit pas grand-chose du miracle d’une vocation : dans la Bretagne des années 70, « Dieu changeait » disait le sociologue : les églises et les séminaires se vidaient, l’enseignement catholique que j’ai fréquenté annonçait bien peu le Christ (pour tout vous dire, je n’ai jamais fait de catéchisme !), bien des membres de ma famille et tant d’amis prenaient leurs distances avec la pratique religieuse et les mœurs prônés par l’Église. Pourquoi quelque chose en moi a résisté et m’a convaincu, en dépit de tout cela, que Jésus est le Chemin, la Vérité, la Vie ? Pourquoi, ayant compris cela, ai-je voulu être moine, carme, missionnaire en Afrique, et tout brûler pour Dieu ? Comment ai-je enfin compris que mon appel était d’être humblement prêtre diocésain, enraciné dans ma terre natale, beleg da viken (prêtre pour l’éternité), convaincu qu’un prêtre catholique dans son église est une des plus belles réalités qui soit ? Allez savoir. Je soupçonne certains d’avoir beaucoup prié, à mon insu, pour que cela arrive… Que cela leur soit pardonné !

Il y a eu aussi la présence de Dieu, les émerveillements d’un enfant religieux, la joie de chanter Dieu avec « la voix de mon grand-père », la fidélité d’un prêtre et celle de mes parents, les questions tourmentées d’un adolescent à l’esprit philosophique et les longues balades solitaires en bord de mer, l’ennui en des lieux loin de la foi et la joie de rencontrer des témoins, la rencontre prodigieuse de l’Église en Afrique, et l’impression d’être subtilement conduit par Dieu là où je ne voulais pas forcément aller. Comment ne pas consentir à ce qui se faisait peu à peu apaisant, insistant, convaincant ? Qui enverrai-je ? Me voici Seigneur, envoie-moi.

 

+ Mgr Gérard le Stang.
Évêque d’Amiens.