Homélie de Mgr Le Stang pour le Vendredi Saint

Crucifie-le, crucifie-le ! Comment la foule, dont nous sommes les membres en vient-elle à préférer Barrabas à Jésus ? Comment en sommes-nous arrivés là ? Face à Dieu, le premier mouvement est celui de la pénitence. Nous aussi, nous sommes capables de nous associer au mimétisme de la foule et de vociférer : Pas lui, Barabbas ! … Pour des raisons obscures qui nous laissent sans illusion sur nous-mêmes et pourraient

nous faire désespérer.

Alors, ce Vendredi Saint, essayons de prendre de la distance avec les hurlements de la foule manipulée et soumise. Approchons-nous de la Croix et laissons-nous juger par elle. Seigneur, aie pitié de moi, juge-moi. Devant Dieu, en sa présence, le premier mouvement est celui de l’humilité, de la contrition, de la pénitence. C’est la première étape pour accéder à la vraie joie. Plus nous reconnaissons notre orgueil et nos motivations ambigües qui nous éloignent de Dieu et même nous opposent à lui, plus la distance diminue entre Lui et nous. Il est là présent, tout proche, crucifié sans juger, pardon jusqu’au bout. Mais si l’orgueil et le déni nous figent, nous aurons du mal à nous laisser atteindre en plein cœur par Celui que nous avons transpercé.

Approchons-nous de la Croix et laissons-nous juger par elle.

La Vierge Marie nous aide. Elle est au pied de la Croix avec le disciple bien-aimé. Elle ne proteste pas. Elle sait que ce Fils qu’elle a présenté à Dieu tout petit est allé librement au bout de son sacrifice. Elle est très lucide sur la cohérence de sa vie, et ne se révolte pas. Il a tout donné à son Père, prenant dans son offrande autant ses amis que ses ennemis. Marie sait déjà que dans l’horreur de la Croix, se joue mystérieusement le dessein de Dieu.

Approchons-nous d’elle, et devenons, auprès d’elle, le disciple bien aimé qui la reçoit pour mère. Redevenons, non pas un membre anonyme de la foule délirante, mais un ami de Jésus qui ne fait pas le fier. Un ami qui voit le dépouillement extrême de Jésus. Un ami qui se laisse juger et purifier par le regard miséricordieux du crucifié. Un ami qui comprend de l’intérieur la parole de l’Évangile : il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. Un ami qui sait qu’il n’y a pas d’autre chemin de vie que de suivre le parcours tout à la fois souffrant et triomphal de la Croix. Amen

Cathédrale Notre-Dame d’Amiens

Vendredi Saint 2022