Fête du Christ-Roi et Journée diocésaine de la Jeunesse

Chers amis,

La perspective des journées mondiales de la jeunesse nous prépare à vivre une rencontre de jeunes chrétiens de la terre entière, avec une conviction au cœur : Jésus est venu pour tout l’univers. Il en est le roi, dit la fête de ce dimanche. Quel que soit son âge, sa culture, sa nation, son pays, Jésus vient pour tous. Il est le contemporain de chacun. Il veut offrir son amitié, son salut, sa vie. Mais que signifie aujourd’hui accueillir Jésus comme roi de sa vie ?

Voyons l’Évangile : le dialogue entre Jésus et Pilate nous éclaire. Ce dialogue est tiré de l’Évangile selon Saint Jean. C’est un des textes les plus fameux de la littérature universelle. Il décrit une rencontre au sommet : Pilate, gouverneur, représente à Jérusalem, occupé par les romains, l’empereur de toute les terres connues à l’époque, le vrai roi du monde, roi temporel hyperpuissant. Pilate finira par livrer Jésus à la foule, en s’en lavant les mains. Mais il est d’abord très troublé par Lui (et ce d’autant plus que sa femme rêve de Lui, si l’on en croit l’Évangile de Matthieu). Il le harcèle de questions. De ce dialogue serré, je retiens deux idées :

 –   Pilate dit à Jésus : Alors, tu es roi ? Jésus : C’est toi qui dis que je suis roi. Jésus se laisse appeler Roi à la manière humaine, mais il dit en même temps : ma royauté n’est pas d’ici. Le titre de Roi, la royauté, le royaume, ce sont des images pour décrire une réalité bien plus profonde, bien plus belle que nos visions monarchiques humaines. La primauté de Dieu est d’une autre nature que la domination des puissants du monde. Le livre de l’Apocalypse dit de Jésus qu’il est le prince des rois de la terre, mais aussi l’Alpha et L’Omega, le commencement et la fin. Autre manière de dire sa suprématie sur tout être.

Puis, Jésus déplace le débat en disant : Roi ou pas, peu importe. Ce qui compte est ma mission qui consiste en ceci : rendre témoignage à la vérité. Jésus ne transige pas avec la vérité, qui chez lui va toujours de pair avec la charité. Je suis le chemin, la vérité, et la vie, dit-il par ailleurs. Jésus est Roi parce qu’il est la Vérité, révélée par son humble humanité, proche des humiliés, des abandonnés, des crucifiés, dont il va faire partie.

 – Jésus est donc notre Roi. OK. Il a donc un Royaume. Mais où ?

Quand on est adolescent, le plus souvent, notre royaume c’est notre chambre, quand on la chance d’en avoir une pour soi tout seul. On peut être maître sur le terrain de foot, chef ou cheftaine avec ses amis scouts, supérieur aux autres, intellectuellement ou esthétiquement. Mais là où on est vraiment roi, c’est dans sa chambre. Ce lieu intime est ton domaine. Tu le décores comme tu veux. Personne ne sait à quel moment tu y roupilles ou tu y travailles. Tu y bricoles avec ton téléphone. Toute personne qui voudrait y faire intrusion – y compris ou à commencer par les parents -, devient un ennemi ou un gêneur.
Mais on n’a pas vocation à passer sa vie dans sa chambre, non ? Le confinement l’a montré suffisamment. Nous avons besoin de grand air. Alors où seras-ton royaume ? Tu pourrais, bien sûr, conquérir un petit territoire et le délimiter, comme le font les chiens. En prenant un pouvoir quelconque, tu pourras devenir le roitelet d’un territoire bien humain, mais surtout fort exigüe. Jésus, Lui, nous ouvre d’autres perspectives : d’abord celle de ne pas être supérieur aux autres, comme un minable roitelet, mais au service des autres ; et ensuite, il te propose d’entrer dans son Royaume.
L’Évangile en effet nous parle bien souvent du Royaume de Dieu, dans lequel on peut entrer dès notre vie sur terre. Comment ? En accueillant Jésus comme le Roi de ta vie, en ayant foi en lui et en l’aimant d’une part ; et d’autre part en faisant comme lui, en rendant témoignage à la vérité : être vrai, toujours faire la vérité, agir en vérité, du fond de son cœur, de sa conscience, avec humilité et courage, avec justice et charité. Celui qui fait cela, dans la foi, avec l’Esprit Sant en lui, entre dans un espace nouveau : il voit la vie autrement, au-delà des apparences, il est libéré de ses peurs, de ce qui lui fait manquer de confiance en lui. Il voit la nature comme la Création de Dieu. Il voit toute sa vie comme un pèlerinage plein de sens. Il voit les autres, y compris ses ennemis, comme des frères et des sœurs. Il ressent souvent une joie profonde en lui. En un mot, il est dans le Royaume de Dieu. Dieu règne dans sa vie. Et il aime ce Dieu.

Jésus, mon ami, mon Roi.
Dans le premier film du Seigneur des anneaux, on assiste à une scène magnifique : un des membres de la communauté, Boromir (frère de Faramir, fils de l’intendant du Gondor), vient de se livrer à une action héroïque, après avoir commis l’erreur de vouloir s’emparer de l’anneau. Il se meurt désormais dans les bras d’Aragorn qui se révèle à lui comme son roi. Il a cette phrase cultissime : « Je vous aurais suivi, mon frère, mon capitaine, mon roi. » Et le roi lui accorde le pardon de sa faute et l’embrasse sur le front. Boromir meurt dans la paix.

Chacun de nous, ce jour, nous pouvons aussi dire au Christ : je te suivrai mon frère, mon capitaine, mon Roi. Avec la grâce de l’Esprit Saint, donne-moi de ne pas te trahir, et de t’aider à ouvrir à tous les hommes les portes de ton Royaume d’Amour

Amen

+ Gérard le Stang.
Évêque d’Amiens

 

Chacun de nous, ce jour, nous pouvons aussi dire au Christ : je te suivrai mon frère, mon capitaine, mon Roi. Avec la grâce de l’Esprit Saint, donne-moi de ne pas te trahir, et de t’aider à ouvrir à tous les hommes les portes de ton Royaume d’Amour