Qui veut tomber dans les filets du Diviseur ?

« Dans les épreuves : Unité, dans le doute : Liberté, en toute chose : Charité. »

Nous trouvons dans cette devise de saint Augustin une boussole sûre pour nous orienter au milieu des brumes de notre époque particulièrement troublée. Épidémie, attentats, limitation du droit de réunion et manifestations pour la messe… Autant d’évènements qui, au lieu de conduire l’Église à se rassembler, avivent de profondes divisions. Le diable – diabolos, le diviseur – tisse sa toile pour nous attraper. Tomberons-nous dans ses filets ?

Le premier piège consiste à nous laisser endormir lentement par une laïcité mal comprise. Atteints par un consensualisme mou et, disons-le franchement, par un affadissement spirituel, nous serions prêts à devenir peu à peu des chrétiens par procuration. Grâce aux écrans, la messe ne serait plus vraiment nécessaire… Alors, faut-il sacrifier l’Église pour la société ? Non.

Le second piège consiste à nous désolidariser du monde. Certes nous « n’appartenons pas » au monde, mais nous sommes « dans le monde » (Jn 15, 19). Et plus que jamais, le monde a besoin de l’Église, priante et agissante, dans les églises, les maisons et auprès des plus pauvres. Donnerons-nous ce témoignage ou étalerons-nous nos déchirures, au risque d’altérer plus encore le témoignage authentique que le Christ attend de nous ? Faut-il sacrifier la société pour l’Église ? Non.

Le dernier piège consiste à utiliser les armes du monde au nom même de la défense de la foi. Victimisation, communautarisme, anathèmes contre les pasteurs de l’Église… Comme les apôtres qui reprochaient au Christ de ne pas prendre le pouvoir en Israël, nous voudrions une Église plus « pure », plus « courageuse »… Faut-il donc sacrifier l’Église pour en faire une autre, à notre image ? Non.

Alors reprenons.

L’unité. Elle n’est pas l’uniformité. Elle consiste à rechercher le Bien commun intégral, sans opposer celui de l’Église à celui de la société, puisque nous sommes et dans l’une et dans l’autre. Elle signifie également que différentes positions peuvent légitimement exister si l’on garde à l’esprit et au cœur que Celui qui nous unit dépasse infiniment nos différences.

La liberté. Elle invite chacun à agir en conscience, éclairée par la prière et par la parole des pasteurs légitimes de l’Église. Dans une situation que nous savons évolutive et transitoire, elle nous invite à utiliser autant que possible les moyens qui nous sont donnés. Ces moyens sont certes incomplets – ils ne « remplacent » pas la messe – mais ils ne sont pas pour autant dénués de valeur et d’efficacité pour notre sanctification.

La charité. Toute action qui ne prend pas sa source en elle se prive elle-même de toute fécondité. Avec elle, tout peut être fait par amour : prière, sacrifice, solidarité, engagement social ou politique. Posons-nous la question : mes engagements sont-ils motivés par la charité ? Pour le savoir, il n’est qu’à regarder la Croix : elle nous apprend qu’il n’y a pas de charité sans un amour désintéressé de soi-même ; sans abandon ni obéissance.

Unité, liberté, charité. C’est ce que nous cherchons à vivre en communauté. Comme hommes et comme prêtres, nous pouvons avoir des regards différents sur l’actualité, mais nous savons que l’heure est trop grave pour nous diviser. En cette fin d’année liturgique, nous formulons ensemble cette prière pour chacun de vous, vos familles et nos paroisses : que le Christ Roi de l’Univers fasse grandir en nous l’unité, la liberté et la charité !

Don Édouard
Don Claude-Noël
Don Charles-Marie
Don François

De gauche à droite sur cette photo:

Don François, Don Claude-Noël, Don Édouard et  Don Charles-Marie