Parole de notre évêque : Action de grâce

Je viens de terminer une dixième visite pastorale et je dois vous dire à quel point la grâce du Seigneur est à l’oeuvre dans nos paroisses. Nous ne le voyons pas toujours.

J’ai plusieurs fois interpellé des équipes de conduite pastorale promptes à voir ce qui ne va pas (et souvent dans un discernement très fin) mais oubliant de nommer le don de Dieu. Celui-ci n’est pas dans les chiffres ni dans les systèmes, mais dans la manière dont, de façons le plus souvent inattendue, des personnes vivent l’expérience du Christ au point de demander à l’Eglise de les accompagner dans ce jaillissement de la vie de Dieu que sont les sacrements ; dans la manière dont des personnes font l’expérience du Christ comme puissance de vie dans la maladie et la précarité, et dans la force du témoignage que l’Esprit Saint leur permet de donner ; dans la solidarité réelle des communautés, sans doute bien plus disponible à être signe de la charité du Christ qu’on ne le dit. Je me rends compte qu’il faut que je relise pour moi-même – et je vous invite à le faire également – le passage de la lettre pastorale que je vous donnais il y a un an « Laissez jaillir l’Esprit », sur la spiritualité de l’action de grâce. Nous ne construirons aucun avenir si nous ne faisons que pleurer sur ce qui est en train de partir, sans discerner dans la foi ce que le Seigneur fait. C’est une certitude de foi : « mon Père est toujours à l’oeuvre, et moi aussi je suis à l’oeuvre » dit Jésus (JEAN 5,17)

Crise

Nous refonder dans l’action de grâce n’est pas esquiver les questions graves et les défis qui se présentent. Oui, nos communautés vieillissent (merci à vous, nos ainés, de votre fidélité !), oui les équipes de service dans nos paroisses sont difficiles à renouveler (toutes les ECP me le disent), oui certaines évolutions peuvent paraître vertigineuses (baisses des demandes de sacrements et du nombre d’enfants catéchisés). Les coups sont rudes. Sécularisation galopante ? Laïcisme rampant ? Rythme de vie bousculé ? Suspicion vis-à-vis des instituions en général et de l’Eglise en particulier ? Médiocrité de notre témoignage ? … Ces raisons et bien d’autres ouvrent sans doute quelques hypothèses pour comprendre.

Pourtant, je voudrais que nous prenions les choses autrement. Jésus dit, en Jean 9,39 : « Je suis venu en ce monde pour une remise en question ». En grec, c’est le mot « crisis » qui est utilisé. Jésus nous met en crise. Il nous secoue. Il nous remet en question, non parce qu’il doute de nous mais parce qu’il a confiance en nous. Il sait que face à ces nouveaux défis, nous saurons répondre par des chemins nouveaux. Alors parce qu’il nous fait confiance, il nous remet en question pour nous désinstaller de nos propriétés, répétitions, sécurités et manque de foi.

Joie

On me demande souvent ce qu’il faut faire. L’évêque est le berger de son peuple. Sur certaines questions, j’aperçois des chemins. Sur d’autres, je ne vois pas vraiment clair. Mais je sais que les solutions qui sollicitent nos analyses, nos discernements, nos projets et nos engagements dépendent d’abord de notre ouverture à l’oeuvre de l’Eprit qui nous mènera là où nous ne pensions pas aller.

Il est évident que cela passera par un renouveau des communautés (et donc la conversion continuée de chacun d’entre nous).

Il est évident que cela passera par la première place donnée aux plus démunis (non pas « contre » les autres, mais comme la prunelle des yeux de Dieu).

Il est évident que cela passera par une manière renouvelée d’habiter la liturgie et de mettre la Parole de Dieu au cœur de tous ce que nous vivons.

Il est évident que cela passera par la renonciation à prétendre être le service public du rite en France, et le consentement à l’audace de la vérité dans la charité de l’Evangile. Il est évident que cela passera par notre capacité aussi à risquer notre confort et notre réputation pour Jésus. Et par notre capacité, jusque dans nos pauvretés, à être présents aux articulations culturelles de notre société.

Dire cela, c’est donner quelques repères sur l’horizon, mais ce n’est pas nommer des moyens concrets ou des procédures adéquates. Nous tâtonnerons. Nous échouerons. Nous réussirons. Nous rendrons grâce. Percevez-vous l’incroyable joie qui nous attend sur le chemin de notre Seigneur qui ne cesse de se donner pour le monde ?

Entrons plus que jamais dans l’année de l’Esprit Saint. Ne manquons pas, chaque matin, la prière du Pasteur Pentecôte, que je vous redonnais à la Saint Firmin : « Bonjour Esprit Saint, je t’aime Esprit Saint, que je vive toute cette journée dans ton Souffle. » Je vous demande de transmettre cette prière à tous ceux qui n’étaient pas à la Saint Firmin1. Dans l’ouverture à l’Esprit Saint, c’est l’actualité et l’avenir de notre diocèse que nous accueillons. Comme j’ai hâte de vivre avec vous le synode diocésain de l’an prochain !

+ OLIVIER LEBORGNE, ÉVÊQUE D’AMIENS

MGR Olivier Leborgne

Prière à l’Esprit-Saint du Pasteur Pentecôte