Nouvelles de l’Église du Pérou

Le père Hubert Boulangé est prêtre du diocèse d’Amiens, ordonné en 1978. Il est en mission « fidei donum » au Pérou. Après 15 ans dans une paroisse de la banlieue marginale de Lima, il est depuis 6 mois á la Prélature de Chuquibamba dans les Andes.Point sur sa nouvelle mission…

 

Père « Humberto », c’est comme cela qu’on vous appelle ici, racontez-nous les 15 ans que vous venez de passer á Campoy, dans la banlieue de Lima.

En 2001, le nouvel évêque du nouveau diocèse de Lima –Est écrivait á Monseigneur Noyer pour lui demander que je revienne sur Lima pour fonder une nouvelle paroisse dans un quartier un peu oublié de son diocèse. C’est pour cela que je suis arrivé á Campoy, dans ce quartier très pauvre. Nous avons fondé une nouvelle paroisse, avec 6 lieux de culte pour une population d’environ 50 000 habitants. J’ai eu le plaisir d’être le premier curé de ce coin perdu, coincé entre la rivière et les collines. Ces banlieues populaires sont très visitées par de nombreuses organisations religieuses. Plus de 40 temples d’autres religions. Cela n’a pas été facile de réunir les catholiques et de les rendre eux-mêmes missionnaires. Très vite nous avons choisi 3 priorités.

  • Une très bonne catéchèse avec les familles. Chaque année 200 familles profondément évangélisées par cette Catéchèse.
  • Une pastorale des jeunes, dynamique et qui va bien au-delà de la simple préparation aux sacrements de l’Initiation chrétienne, avec de très nombreuses activités pour l’ensemble des jeunes des quartiers. Beaucoup de jeunes ont pu découvrir leur vocations au service de la communauté, par l’éducation, le sport, les activités artistiques etc…
  • Et en même temps une Pastorale Sociale très orientée sur la santé. Pour cela nous avons fait un Centre de Santé qui est aujourd’hui très bien apprécié autant par la population que par les autorités en matière de Santé.

 

Et tout cela, avec votre départ, qu’est-ce que cela devient ?

Tout continue, entre les mains du clergé péruvien qui prend la relève. Je suis très heureux de pouvoir constater que tout ce que nous avons mis en place, est suffisamment solide pour que mon départ n’affecte en rien la continuité de notre travail. Tout le temps de ma présence sur Campoy soit j’étais seul prêtre soit au mieux j’avais un vicaire. Maintenant, il y a trois prêtres qui travaillent bien. Chaque année j’ai envoyé 100 personnes en formation. Maintenant il y a un ensemble de laïques biens formés et très missionnaires, et la paroisse est reconnue dans le panorama des institutions qui promeuvent le dynamisme local. Une grande satisfaction de constater que la paroisse bénéficie de la confiance des dirigeants locaux.

Comment avez-vous quitté Campoy, pour aller á 900 kilomètres plus au sud, á la Prélature de Chuquibamba ?

Naturellement, au bout de 15 ans, j’ai eu la sensation que ma mission á Campoy était terminée. Il était temps de passer le relais au clergé péruvien. Je m’apprêtais avec beaucoup de joie á envisager mon retour sur Amiens. Mais voilà, qu’un ami prêtre péruvien, presque voisin de la paroisse de Campoy et que j’appréciais beaucoup, a été nommé évêque de Chuquibamba. J’ignorais totalement cette Prélature perdue dans les Andes. Je suis allé á son ordination avec une belle délégation du diocèse de Chosica, et là, au moment de la Paix, le jeune évêque me dit : « j’aurais besoin de toi ! ». Quelques semaines après nous sommes vus. Il m’a clairement demandé de venir l’aider. Á Rome il a rencontré monseigneur Leborgne. Et me revoilà, pour 3 ans au moins embarqué dans une nouvelle mission, vraiment différente.

 

Racontez donc, Chuquibamba, votre mission, la vie des gens

Á Campoy, c’était une pauvreté urbaine, très frustrante car les riches et les très riches sont juste á coté. Mais á Lima il y a aussi des opportunités pour étudier et pour travailler plus ou moins. Ici les gens vivent comme ont toujours vécu leurs ancêtres, sans évolution, sans changements. Une vie lié á la terre et au climat. Les gens ici n’ont pas faim, il y a toujours de quoi manger á la campagne, mais pas un sou pour étudier, ou pour payer le transport et aller vendre quelques légumes. De plus la géographie est redoutables, on est entre les sommets qui montent jusqu’á 6 000 mètres, les chemins sont constamment détruits par les pluies et les glissements de terrain. Les paysages sont magnifiques, mais la vie est très très dure. L’habitat est très dispersé, le clergé, peu nombreux et très isolé. Il y a aussi la formation qu’ils ont reçue, et qui ne correspond pas toujours aux défis de la foi catholique d’aujourd’hui.

Quelle est votre mission dans cette Prélature ?

Une Prélature c’est la dénomination pudique d’un diocèse jeune et pauvre. Selon le nouvel évêque je peux apporter trois éléments importants :

  • Mettre en place la formation des laïques : les catéchistes et toute sorte d’agent pastoral pour la liturgie, la solidarité, les jeunes etc…
  • Coordonner toute la pastorale sociale, pour qu’elle soit vraiment au service des plus pauvres.
  • Permettre que le clergé diocésain ait une spiritualité adaptée á la réalité locale.

Pour cela je suis très proche de l’évêque, nous vivons ensemble et avec le Vicaire Général. En même temps nous assumons, avec le Vicaire Général, une toute petite paroisse á quelques kilomètres de Camaná où nous vivons. Avec l’évêque et le Vicaire Général nous voyageons beaucoup pour visiter les paroisses dans les Andes.

En quoi un prêtre étranger peut-il apporter quelque chose á la formation des laïques et des prêtres de Chuquibamba ?

Évidemment cela surprend. L’évêque de Chuquibamba me connait depuis des années, il a vu que je pouvais apporter quelques éléments de formation avec 40 ans de sacerdoce et pratiquement la moitié au Pérou. Je crois aussi que la vie d’Église que nous avons en Europe, au milieu d’un monde relativement indifférent, nous donne quelques lignes de réflexions spirituelles, aussi bien avec des Maitres comme : Thérèse de Lisieux ou Madeline Delbrel, mais aussi avec la préoccupation missionnaire que l’on retrouve dans les Mouvements d’Évangélisation.