Église et politique

Composée de femmes et d’hommes très divers l’Église forme la grande famille des catholiques. Les membres de cette famille peuvent-ils s’aider à faire  leur choix parmi les candidats aux élections ?

L’aide à choisir sérieusement un candidat se pratique dès l’enfance.

Ne vient-elle pas  d’abord de l’éducation au « vivre ensemble »? Un échange en famille sur l’élection des délégués de classes est l’occasion d’un apprentissage au discernement ultérieur pour élire un président de la république : « veux-tu un délégué de ta classe pour servir ou bien pour  montrer son pouvoir?  Ton vote t’engage à quoi ? ». Les jeunes se souviennent du témoignage chrétien de leurs grands-parents. Ces ainés ont une grande responsabilité de formation pour l’éveil au choix des bons guides. Des débats, même agités, autour de la table de famille, valent  mieux qu’un silence démobilisateur. Ces échanges sur les candidats et leurs programmes forment d’autant mieux les  consciences des chrétiens que ces éducateurs expriment leurs interprétations de l’évangile.

L’aide entre chrétiens pour choisir un bon candidat est précieuse, indispensable.

Le bon sens chrétien conduit à se laisser interroger par la perception des frères et sœurs, mêmes d’opinions différentes : l’action de l’Esprit saint se découvre mieux dans l’échange entre frères.  Reparler d’une émission, évoquer un article, aident à se faire un jugement :

« Dans les programmes, il y a-t-il  des propositions qui répondent à mon attente, à l’attente de mes amis, de mes collègues ? »

Les lectures bibliques que les paroissiens peuvent écouter aux messes éduquent aussi au discernement :
Dans l’ancien testament les  récits  des relations tendues entre les rois et les prophètes éveillent l’attention.  La recherche de justes relations entre « le politique » et « le religieux » conduit à bien choisir le chef du peuple. Un profil de roi apparaît : rassembleur, défenseur des pauvres, amis de la justice, respectueux de Dieu.

Mais attention ! Le serviteur de Dieu peut être un païen ? Tel Cyrus, qui vient d’ailleurs délivrer le peuple juif en captivité à Babylone.

La vie même de la communauté paroissiale contribue à choisir avec sagesse, sans passion excessive un candidat.

A chaque messe les chrétiens sont invités à prier pour les responsables politiques. Et pas seulement à la messe ! La prière permet un recul, un décentrement, une dépossession, une confiance favorable au discernement. La paix échangée entre fidèles d’opinions différentes, nourrit une attitude de tolérance et d’humilité dans les choix électifs.Nombre de chrétiens se retrouvent régulièrement dans des équipes fraternelles. Ensemble ils peuvent mieux interpréter la parole du Seigneur : « rendez à César ce qui est à César et Dieu ce qui est à Dieu ». Parole purificatrice des intentions. Il n’y a pas lieu de «sacraliser » tel ou tel candidat ou choix politique, en se réclamant directement de Dieu. L’important, c’est que chaque disciple du Christ, éclairé et soutenu par la Parole de l’Évangile, s’engage pour combattre l’exclusion, faire reculer la misère. Aucun César ne peut prétendre être le maître absolu des hommes.  L’évangéliste Jean  présente Pilate comme un pantin guidé par son environnement.  La versatilité des foules de Jérusalem n’est pas sans rapport aux sondages et aux médias d’aujourd’hui. Seul le Christ, « le chemin, la vérité, la Vie », mérite l’adhésion totale des hommes. Jésus s’oppose ainsi à toute adoration de César, et ramène le politique à ce qu’il est : une activité humaine.

Des diocèses, des mouvements, des communautés proposent des formations au discernement politique.

Le « Parcours Zachée » apprend à ouvrir les yeux sur  les diverses propositions politiques émanant de la société. Ouverte au dialogue avec le monde cette formation, comme bien d’autres proposées par l’Église, apprend à connaître la « pensée sociale de l’Église.  Cette distinction entre César et Dieu conduit à se mobiliser pour un engagement citoyen éclairé par la relation à Dieu. De fait,  les catholiques votent ; si un proche s’abstient, le plus souvent il est interrogé sur son absence de contribution. Belle occasion de s’écouter et d’expliquer combien le Seigneur valorise la responsabilité des hommes pour la conduite du monde.

L’aide de pasteurs peut aider les fidèles à faire un choix ?

L’évêque de Rome, notre Pape, comme ces prédécesseurs, avec audace, indique de fermes orientations. Il n’est pas facultatif de participer à la vie politique de son pays. Un vidéo montre un jeune interroger le Pape : « Est-il bon de participer à la politique ? » «Débé» répond le Saint Père: « Tu dois !». Son attention au développement intégral de l’homme conduit à dénoncer très vertement des situations inhumaines indignes qui bafouent l’homme créé à l’image et la ressemblance de Dieu.  Dénonciation de l’indifférence des riches au malheur des pauvres, tels ceux disparus en méditerranée.

A chaque élection nationale les évêques de France appellent l’attention sur des situations. La séparation de l’Église et de l’état offre aux évêques et aux prêtres une remarquable liberté de paroles. Leurs lieux de présences, leurs actions, leurs gestes, bien mieux que leurs paroles, actualisent le prophétisme de l’évangile. Ils  invitent à observer la société qui se construit, à écouter les hommes. Ils rappellent  l’urgence d’une attention à la voix des pauvres. Ils alertent sur l’utilisation de nouvelles technologies : que la dignité de la personne humaine, de sa conception à sa mort, soit respectée.  Ils mobilisent pour que la recherche du bien commun l’emporte sur l’égoïsme. Ils attirent l’attention sur l’éducation, les inégalités, la famille, le refus de la violence, le besoin de démocratie, les questions écologiques, l’avenir de l’Europe, le respect de la laïcité, l’ouverture à l’universalisme. Devant les peurs Ils appellent  à donner du sens et de l’espérance. Pour choisir, les électeurs sont invités à la réflexion : Quelle société promeut chaque  candidat ? Quel vivre ensemble dans le monde serviront ils ? Quel respect ont-ils pour la personne ? Des paroisses relaient la publication récente d’un livret du Conseil Permanent des Évêques de France : « Dans un monde qui change retrouver le sens du politique »

A la lumière de la doctrine sociale de l’Église existe-t-il un programme qui serait celui des chrétiens ? Un candidat soutenu par L’Église catholique ? Très clairement l’église se tient à distance des partis et des choix de candidats et ne se prononce pas. La diversité des propositions lui paraît même une richesse démocratique respectueuse de la liberté. Elle laisse chaque électeur décider en conscience.

Dans la pratique, beaucoup d’électeurs se voient obligés d’accepter des compromis. Chaque candidat affirme, vit, des réalités, aux quelles des électeurs ne souscrivent pas. Conviendrait-il alors de s’abstenir ? La non-participation élective à un choix important et ressentie comme une démission à la solidarité. A la lumière de la recherche du bien commun le choix du « moindre mal » s’avère plus responsable.

A la lecture, des programmes de gouvernement peuvent clignoter des feux : feu vert, feu jaune, feu rouge. Ce dernier s’allume quand la vie physique, humaine, spirituelle est clairement menacée. La dignité de la personne humaine, crée à l’image et la ressemblance de Dieu, est un bien absolu. Ce sacré de l’homme, reconnu universellement, interdit de porter atteinte à la vie.

« Comment l’Église peut-elle aider les fidèles à faire leurs choix de candidats? »
Jésus est venu pour tous les hommes. Ses paroles s’adressent à tous, quelques soient leurs convictions. L’Esprit Saint impulse sa sagesse divine dans tous les cœurs.  Les chrétiens savent qu’ils ne sont pas propriétaires de la vérité : « quiconque pratique la justice est né de Dieu » I Jean 2,29.  Ils ont à cœur d’écouter ce qui se dit aussi de juste aux périphéries. Ils réfléchissent, prient et prennent leurs responsabilités.

 Abbé Gilles de la SIMONE

Abbé Gilles de la Simone
Prêtre accompagnateur auprès du monde judiciaire et politique
delasimonegilles@gmail.com

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Livre des Evêques de France

Jésus est venu pour tous les hommes. Ses paroles s’adressent à tous, quelques soient leurs convictions. L’Esprit Saint impulse sa sagesse divine dans tous les cœurs.